Pourquoi la mie de pain a-t-elle des trous ?
HISTOIRES DE SAVOIR - Jean-Luc Nothias met en lumière le rôle essentiel des levures dans la fabrication du pain.
Tout est dans la bulle. Dans sa taille, sa répartition, son nombre… Tout comme pour le champagne, un bon pain se doit de posséder des «bulles» ni trop petites ni trop grosses, de tailles comparables et harmonieusement placées pour nos papilles. Et si un bon pain dépend évidemment du savoir-faire du boulanger et de la qualité de la matière première utilisée, en particulier de la farine, il doit son existence à une innombrable armée de petits bras invisibles qui vont opérer l'alchimie magique de la mie de pain. Voici venir les levures.
Pour faire du pain, il faut de la farine (le plus souvent de blé), de l'eau, du sel et des levures. Celles-ci sont des micro-organismes unicellulaires eucaryotes. C'est-à-dire qu'à la différence des bactéries, leurs chromosomes sont placés dans un noyau à l'intérieur de la cellule qui est ronde ou ovale. On connaît plus de 1 000 espèces de levures mais la plus utilisée dans l'alimentation est la fameuse Saccharomyces cerevisiae (le «champignon à sucre de cervoise», la boisson des Gaulois) qui intervient dans la fabrication du pain mais aussi de la bière ou du vin. Utilisée depuis l'Antiquité de manière empirique, cette levure a été «démasquée» par un médecin botaniste allemand, Franz Meyen, qui la décrivit complètement en 1837. Et si Louis Pasteur est connu pour ses travaux sur la rage, il devrait l'être plus encore pour ses travaux sur les levures et les bactéries, car il va jeter les bases scientifiques de ce que l'on sait sur elles.
Éthanol et gaz carbonique
Une levure est un petit être exceptionnel : elle est munie de deux systèmes de «respiration». Elle peut faire comme nous et vivre en respirant de l'oxygène. Oxygène qui va lui permettre de se servir des sucres pour s'alimenter en produisant du gaz carbonique. Mais elle est aussi capable de vivre tout aussi confortablement sans oxygène. Dans ce deuxième cas, on parle de fermentation. La levure transforme les sucres en produisant de l'éthanol et du gaz carbonique. Ainsi, la levure est capable de «faire» du pain, de la bière, du vin ou… des biocarburants.
Prenons le cas du pain. Au départ, il y a un blé tendre qui pousse dans un champ. Comme tout végétal qui se respecte, il se fait un devoir de former des graines, réunies dans son épi. Et au cœur de la graine, il «entrepose» des réserves de nourriture nécessaire à la germination. Ces réserves de nourriture vont donner la farine. Elle est constituée en majorité (85 à 90 %) d'amidon, des millions de molécules de glucose, le reste étant des matières azotées et des protéines que l'on appelle gluten, au rôle crucial.
Une fois tout cela décortiqué, isolé, purifié, le boulanger reçoit sa farine. Cette poudre, associée aux autres ingrédients dans des proportions bien précises, va être transformée en pâte élastique grâce au pétrissage. À la main ou dans le pétrin, cela va donner une cohésion à la pâte grâce au gluten, dont la racine «glu» donne le sens. Il va constituer comme une toile d'araignée tridimensionnelle collante qui va maintenir dans une sorte de corset le reste de la matière du pain.
La fermentation des levures
Pendant que le gluten fait sa toile, aidé par le sel, les millions de cellules de levures s'activent. Elles entament la «pousse» ou aussi «levée», étape en deux temps pendant lesquels le volume de la pâte va être fortement augmenté (multiplié par trois en fin d'opération). Car les levures dans la pâte sont privées d'oxygène. Elles fermentent donc en produisant de l'éthanol et du gaz carbonique. C'est ce gaz qui va dilater la pâte et créer des bulles en son sein, qui donneront les trous de la mie. Et qui donneront au pain son moelleux.
On constate sans peine que les conditions nécessaires à la réalisation d'un bon pain sont légion. Matière première (la qualité du blé), température (28 °, optimal pour les levures), temps de pétrissage (pour le gluten) et temps de repos, additif éventuels qui peuvent agir sur certaines phases, etc. Le boulanger a du pain sur la planche.
Respire-t-on du gaz carbonique quand on mange du pain et doit-on craindre l'alcootest (à cause de l'éthanol, à la base de l'alcool) ? Car la multitude de petites levures, piochant dans les sucres de la farine, en produisent une bonne quantité. C'est pour cela, entre autre, que la pâte avant cuisson est indigeste, qu'elle a un goût très différent et qu'elle est un tant soit peu enivrante. C'est au cours de la cuisson (à 250 °) que gaz carbonique et éthanol vont s'évaporer. La cuisson va également transformer l'amidon en le rendant plus digeste. Mais elle va aussi «liquider» la nuée d'ouvriers invisibles. C'est la sortie de scène des levures. En toute majesté.
Um comentário:
uí,úí, uí...tré bien..pero le burracô é tré mair embaixô!!!!
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